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29 mai 1913 : Le Sacre du printemps fait scandale à la première à Paris

Publié le par Perceval

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29 mai 1913 : Le Sacre du printemps du compositeur russe Igor Stravinski et du chorégraphe Vaslav Nijinski dansé par les Ballets russes de Serge de Diaghilev fait scandale à la première à Paris.

Igor Stravinsky et Vaslav Nijinski habillé en Petrouchka

En 1910, Stravinsky a triomphé avec L’oiseau de feu et en 1911 avec Petrouchka. Quant aux Ballets russes de Serge Diaghilev, ils sont la référence attendue pour chaque saison parisienne.

Nijinski n’en est certes pas à son coup d’essai, puisqu’il a créé, dansé, en 1912, Le prélude à l’après-midi d’un faune de Claude Debussy, qui avait – déjà – fait quelque scandale.

 

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Le Sacre du Printemps est né d’une idée d’Igor Stravinsky en 1910, alors qu’il se consacrait à l’écriture de L’Oiseau de Feu. Il « entrevit dans [son] imagination le spectacle d’un grand rite sacral païen : les vieux sages, assis en cercle et observant la danse à la mort d’une jeune fille, qu’ils sacrifient pour leur rendre propice le dieu du printemps. Ce fut le thème du Sacre du Printemps » (Chroniques, 1950).

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Le Sacre du Printemps - les danseurs : Julitska, Rambert, Jejerska, Boni, Boniecka, Faithful, dans les costumes de Nicholas Roerich, In le magazine The Sketch, Londres, 1913

 

le-Sacre-du-Printemps---choregraphie-de-Vaslav-Nijinski--m.jpgDès les premières notes, des rires et des moqueries retentirent (« faites venir un dentiste pour la dame ! », « ta gueule ! », « qu’on arrête de se moquer de nous ! »). « Ces manifestations, d’abord isolées, devinrent bientôt générales et, provoquant d’autre part des contre-manifestations, elles se transformèrent très vite en un vacarme épouvantable. Je n’avais jamais été aussi furieux de ma vie ». On sait aujourd’hui que Diaghilev, en prévision d’un potentiel scandale, avait distribué des billets d’arrières corbeilles à de jeunes étudiants parisiens, chargés de soutenir l’œuvre par des applaudissements nourris. Ce qu’ils firent avec force et conviction, rendant l’atmosphère encore plus électrique.

La salle était en ébullition. « Je passais en coulisses et demeurait là pendant toute la représentation à côté de Nijinsky. Celui-ci était debout sur une chaise, criant éperdument aux danseurs (« seize, dix-sept, dix-huit !»). Naturellement les pauvres danseurs n’entendaient rien à cause du tumulte dans la salle et de leur propre trépignement. Je devais tenir Nijinsky par son vêtement car il rageait, prêt à tout moment à bondir sur la scène pour faire un esclandre. Diaghilev, dans l’intention de faire cesser ce tapage, donnait aux électriciens l’ordre tantôt d’allumer, tantôt d’éteindre la lumière dans la salle. C’est tout ce que j’ai retenu de cette première ».

De son côté, Monteux dirigeait l’Orchestre des Ballets Russes et restait « impassible et blindé comme un crocodile ». Cocteau retrouva à deux heures du matin Stravinsky, Nijinsky et Diaghilev. Ce dernier, en pleurs, répétait sans cesse : « c’est exactement ce que je voulais » dans les bras d’un Nijinsky, blanc comme un linge. Pendant ce temps, le compositeur, excité, furieux et dégoûté faisait les cents pas dans la pièce.Marie-Piltz--danse-du-sacrifice---croquis-de-Valentine-Gros.jpg

 

Pierre Lalo, dans le Temps :

« Tout est laid, lourdement, platement et uniformément laid. Danseurs et danseurs ne s’élèvent jamais de terre, restent ramassés sur eux-mêmes, bras et jambes contractés, s’agitant avec une pesante et gauche frénésie. On se doit de faire face à l’inadmissible refus de la grâce traditionnelle ; le choix est entre civilisation et barbarie. »

Adolphe Boschot, dans L’Echo de Paris, évoque les danseurs :

« [ils] répètent cent fois de suite le même geste : ils piétinent sur place, ils piétinent, ils piétinent et ils piétinent… Couic : ils se cassent en deux et se saluent. Et ils piétinent, ils piétinent, ils piétinent… Couic…. »

 

*****

Recréation par le Joffrey Ballet de la chorégraphie originale de Nijinsky pour "Le Sacre du printemps" d'Igor Stravinsky (1913)

 

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