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Sofia Kovalevskaia, une mathématicienne, et bien plus … -2-

Publié le par Perceval

Sofia Kovalevskaia (1850-1891) rêve souvent de son arrière-grand-père Fedor Schubert. Ces rêves l'aident dans son travail. Un jour, son arrière-grand-père lui donne en rêve l’idée de la "mécanique céleste" et de l’étude des "anneaux de Saturne". « Je sens que je suis destiné à servir la vérité - la science et son ouverture aux femmes - car cela signifie : servir la justice. Je suis très heureuse d'être née femme, car cela me permet de servir simultanément la vérité et la justice », a t-elle écrit …

 

Sofia à vingt et un ans se retrouve à Paris pendant la commune ; en effet sa sœur Anna (1843-1887) et son mari français Victor Jaclard  participent à la première internationale… Anna est une socialiste et féministe révolutionnaire russe. Elle participe à la Commune de Paris (1871) et à l'Association internationale des travailleurs. Elle est liée d'amitié avec Karl Marx et a été fiancée, pendant un temps, avec Fiodor Dostoïevski...

Anna Jaclard

Avec son mari, Anna participe activement à la Commune de Paris de 1871. Elle siège au Comité de vigilance de Montmartre , elle est active dans l'organisation de l'approvisionnement alimentaire de la ville assiégée de Paris, elle a co-fondé et écrit pour le journal La Sociale, elle agit comme une des représentantes de la section russe de l'Internationale et participe à un comité sur les droits des femmes. Anna s’acharne nuit et jour à soigner les insurgés blessés. « Une héroïne » dira d’elle : Louise Michel.

Sofia Kovalevskaia retourne en Russie.

Elle demande de l'aide au grand mathématicien Karl Weierstrass.. Quand elle le rencontre, elle ne peut trouver ses mots, elle renverse ses feuilles de notes.  Cependant, après avoir examiné son travail, le scientifique est impressionné et accepte de donner à Sophia des leçons privées. 

Elle travaille sur les équations aux dérivées partielles, corrigeant et améliorant un résultat de Cauchy (énonçant et démontrant ce que l'on appelle aujourd'hui le théorème de Cauchy-Kowalevski). Elle écrit un mémoire sur les intégrales abéliennes. Enfin, un troisième mémoire porte sur la forme des anneaux de Saturne. Pour ces trois mémoires, elle obtient le titre de docteur de l'université de Göttingen en 1874...

Weirshtrass

En 1881, elle est élue membre de la Société mathématique de Moscou, mais elle ne peut réaliser son rêve : celui d'enseigner à l'université …

Sofia Kovalevskaia plaisante ainsi : « Lorsque Pythagore a découvert son célèbre théorème, il a sacrifié 100 taureaux aux dieux. Aujourd'hui, tout le bétail a peur … ! »

 

En dépit de ce doctorat, et des lettres de recommandation forte de Weierstrass, Sofia Kovalevskaya est incapable – comme femme - d'obtenir un poste universitaire.

Avec son mari, traducteur de Darwin en russe, Sofia va en Angleterre où elle fait notamment la connaissance de George Eliot et de Herbert Spencer.

De retour en Russie ; avec son mari, elle a une fille. Elle s’essaye à des articles scientifiques, des fictions, des critiques de théâtre...

Sofia Kovalevskaya et sa fille

Le mari de Sofia est proche des sociétés révolutionnaires, envers lesquels Alexandre III durcit sa position ; il persuade sa femme de quitter la Russie...

Elle part alors à Paris avec sa fille .. Les pires rêves de Sofia, se réalisent : Kovalevsky se ruine par une transaction infructueuse, et se suicide; il a 40 ans. 

Lors de sa mort, il laisse une lettre à son frère: « Écris à Sophia que je pensais toujours à elle et combien je me sens coupable d'avoir ruiné sa vie ... ».

La mort de son mari est un coup dur pour Sofia. Elle n'a pas pu manger pendant quatre jours et est tombée malade de faiblesse. 

 

Après s'être remise un peu, et devenue veuve, Sofia retourne aux mathématiques avec une ferveur nouvelle. Elle présente un document sur les intégrales abéliennes à une conférence scientifique et est très bien reçue. Elle décide de revenir à Berlin, le professeur Weierstrass, avec l'aide de son collègue suédois Mittag-Leffler, la soutienne et l'aide à devenir professeur de mathématiques à l'université de Stockholm en 1884. Sofia a 34 ans, elle est une jeune scientifique reconnue.

 

Après avoir reçu une reconnaissance mondiale, Sofia écrit: « Ma renommée m'a privé du bonheur d'une femme ordinaire ... Pourquoi un homme ne peut-il m'aimer? Je pourrais donner à un être cher plus que beaucoup de femmes... Pourquoi aiment-elles ce qui est le plus insignifiant, et que personne ne m'aime? » Les admirateurs de ses travaux, et « l'amour libre » à la mode, ne lui apportent pas le bonheur. 

Des proches témoignent : « Elle n'était pas heureuse, elle ne pouvait pas s'habituer à Stockholm, ni ailleurs dans le monde... Elle avait toujours besoin de nouvelles sollicitations pour son activité mentale, elle demandait de la passion, à la vie. »

 

Dans les années 1880, Sofia rencontre un parent de son défunt mari, Maxim Kovalevsky. Il n'est pas élégant, ni beau, un gros monsieur de bonne nature et gai. Sofia plaisante ainsi de son admirateur : « Il prend trop de place sur le canapé et dans mes pensées... » Maxim est un sociologue respecté dans le monde et a donne des conférences à Paris, à Londres et à Berlin. Maxim est devenu un adhérent de la Loge maçonnique, dont les activités sont légendaires. Il est sensible aux vues spirituelles de Sofia. 

 

Elle reçoit par l’intermédiaire d’un ancien étudiant de Weierstrass : Gosta Mittag-Leffler, des invitations à donner des conférences à l'Université de Stockholm. Au début, c’était seulement un poste temporaire, elle y reste cinq ans. Puis vient une série de grandes réalisations. Elle a acquis un poste permanent à l'université, est nommée rédactrice en chef d'une revue de mathématiques... Dans le même temps, elle a co-écrit une pièce de théâtre, «La lutte pour le bonheur», avec une amie, Anna Leffler.

En 1887, Sofia apprend la mort de sa sœur, Anya ( Anna)..

En 1888, avec son étude : "Sur la rotation d'un corps solide à un point fixe'', elle gagne le Prix Bordin de l'Académie française des sciences … Le document est si hautement considéré que le prix est augmenté, passant de 3000 à 5000 francs. Ce prix lui permet d’obtenir une chaire à vie en mathématiques à Stockholm en 1889 et de devenir membre de l'Académie des Sciences de Russie.

Maxim et Sofia passent l'été dans la villa de Maxim à Nice, mais Sofia n'ose pas accepter la proposition de mariage.

En 1890, ils se séparent, mais se retrouvent bientôt, et finalement Sofia accepte. Le mariage est prévu pour l'été.

Alors, des pressentiments commencent à hanter Sofia. Une nuit, après un cauchemar, elle persuade le marié de se rendre à Gênes, plus exactement dans l'ancien cimetière de Santo Campo. Elle erre longtemps dans les tombes jusqu'à ce qu'elle s'arrête devant l'une des statues. Après s'être tenue silencieuse, elle dit à Maxim: «L'un de nous ne survivra pas à cette année!» .

Sur le chemin du retour à Stockholm, elle attrape un ''coup de froid'' et anticipe la fin prochaine de sa vie. «Il y a un changement en moi», a-t-elle dit. 

Le 10 Février 1891, Sofia Kovalevskaya meurt à 41ans d’une pneumonie. Elle est enterrée à Stockholm.

 

Elle a écrit des souvenirs d'enfance, des pièces de théâtre (en collaboration avec Anne-Charlotte Leffler) et un roman partiellement autobiographique : Une nihiliste (1890).

http://bibliotheque-russe-et-slave.com/Livres/Kovalevskaia%20-%20Une%20nihiliste.htm

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A
J'ai adoré cet article. J'ai son livre, "Une nihiliste, que je n'ai pas encore lu. Quelle femme, quelle vie, encore...Merci.
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P
Bonjour, et merci pour ce message ...