Du Féminin légendaire... Lilith -1/.-

Je commence une nouvelle série, sur des figures féminines légendaires...

Très présente dans la mythologie, et les légendes du monde entier, la figure féminine s'est imposée très vite, et sans doute plus par ce que '' La Femme '' représente, que par ce qu'elle a été valorisée dans l'Histoire...

Notre mémoire a aussi retenue davantage les héros d'histoires racontées par des hommes ; que celles provenant du fond des âges et qui devaient l'être aussi beaucoup par les femmes.

Originellement, dans notre tradition, la figure féminine symbolise la souveraineté et la fertilité... Ensuite, au cours des contes, les stéréotypes sociaux vont prendre le dessus...

Marie Louise Von Franz, dans '' La Femme dans les contes de fées'' nous enseigne :

'' Pour désigner l’archétype féminin, symbole universel de la femme, Carl Gustav Jung s'est servi du mot latin anima qui signifie âme. Animus en est le complément qui désigne l’archétype masculin, symbole universel de l’homme. Anima et animus sont deux pôles de l'âme, complémentaires et contraires, constituant l'inconscient.

L'anima désigne l'image inconsciente de la femme en général que tout homme porte en lui : « l'idéal féminin ». L'anima désigne aussi la part féminine, c'est-à-dire les caractéristiques habituellement attribuées aux femmes, sensibilité, émotivité, intuition, sentiment qui s'exprime en chaque homme. L'anima est pourvoyeuse d'humeurs. Positive, l'anima développera les dons de l'homme, lui fera idéaliser la femme, le rendra entreprenant. L'anima négative se manifeste chez lui par des difficultés à contrôler sa sensibilité, son émotivité. Il pourra manifester des sautes d'humeur, des tendances aux caprices, se montrer irritable, vindicatif, tyrannique, méfiant. Pour se réaliser de façon équilibrée dans sa totalité, l’homme a besoin de développer son anima, ses qualités féminines et son éros, il devra apprendre à tenir compte des relations individuelles et concrètes et ne pas se perdre dans son monde rationnel. (p. 109)

Lilith

Je commence au début des temps, non pas par Eve, mais par Lilith, nommée - par Isaïe 34, 14 dans la Bible - de ''créature de la nuit '', mais de fait absente de la Bible canonique... Elle est présente dans les écrits rabbiniques : (Genèse Rabba 18:4, et 22:7). Un écrit plus tardif, le "midrach" intitulé Alphabet de Ben Sira, rédigé vers le Xe siècle, met vraiment en scène cette première femme. Et le Zohar, complète la description...

Burney Relief, Babylon (1800-1750 BCE)

Lilitû serait un démon femelle sumérien, que l'on rapproche de Lillaka dans l'épopée de Gilgamesh... Déesse serpent, ou déesse ailée, elle est liée à la Déesse-Mère, dominante par sa sexualité et sa fécondité sans limite... Peut-être, apparaît-elle aussi dans Isis, la déesse ailée de l’Égypte ancienne...

Dans notre tradition, ne pourrait-elle pas évoquer un matriarcat préexistant au patriarcat... ?

Selon des sources juives du Talmud, Lilith serait la première conjointe d'Adam.

Elle apparaît comme une femme révoltée, refusant la soumission, exigeant une place égale à celle de l’homme...

Dans le premier récit de la Genèse, Dieu crée l’homme « mâle et femelle », elle est tirée de la même terre qu'Adam...

Lilith (de John Collier)

Puis … Lilith refuse de se tenir au-dessous de lui quand ils font l'amour, ce qui provoque une dispute. Elle invoque alors le nom de l'Éternel, des ailes lui poussent, et elle abandonne Adam et l'Éden. Devant les plaintes d'Adam, Dieu envoie trois anges convaincre Lilith, qui refuse.

Lilith s'est révoltée, quitte le Paradis, se mêle à la cohorte des anges déchus et devient la grande maîtresse des servantes appelées succubes. Selon certaines versions, c’est même elle qui se cache sous les traits du Serpent, pour tenter le nouveau couple et se venger ainsi d’Adam, de sa rivale Eve et du Créateur lui-même...

Dans le second récit de la Genèse, seul l’Adam mâle est créé, et Eve est tirée de l’une de ses côtes, ce qui rompt l'égalité …

'Lilith' from Michelangelo's 'The Temptation of Adam and Eve'

Au XIXe siècle, les rapports de sexe en étaient arrivés au point où pour l'homme , la femme était '' l'autre '' par excellence: inquiétant et séduisant. Ange ou démone, son pouvoir érotique était sublimé... Pour l'écrivain Marcel Schwob (1867-1905), Lilith était le mythe fondateur du féminin...

« Alors il aima Lilith, la première femme d’Adam, qui ne fut pas créée de l’homme. Elle ne fut pas faite de terre rouge, comme Eve, mais de matière inhumaine ; elle avait été semblable au serpent, et ce fut elle qui tenta le serpent pour tenter les autres. Il lui parut qu’elle était plus vraiment femme, et la première, de sorte que la fille du Nord qu’il aima finalement dans cette vie, et qu’il épousa, il lui donna le nom de Lilith » ( M. Schwob, Cœur double, p. 97. )